vendredi 14 octobre 2016

Le Bestiaire des Clichés, partie 1 : les loups

Illustration : le Petit Chaperon Rouge de Carl Larsson, 1881

 

Le Bestiaire des Clichés, partie 1 : les loups

 

Qu’il est mignon le toutou !


« Votre groupe s’aventure au plus profond de la forêt mystérieuse et vous marchez de longues heures. Soudain, un hurlement à vous glacer les sangs retentit. Puis un autre. Et un troisième. Des yeux phosphorescents brillent tout autour de vous. Vous êtes encerclés par une meute de loups. Que faites-vous ? »

Qui n’a pas déjà vécu cette situation lors d’un JdR médiéval-fantastique ? Les loups sont un des opposants les plus vus et revus lors de nos parties et, pourtant, il y a une très bonne raison de s’en passer : les loups n’attaquent quasiment jamais l’homme. Et encore plus rarement les elfes ou les nains, la preuve : citez-moi un seul cas fiable et bien documenté d’attaque de loup sur un elfe ou un nain !

Plus sérieusement, l’image de bête sauvage agressive des loups est très fortement exagérée. Pourquoi ? Principalement parce que nous baignons pour la plupart dans une culture occidentale judéo-chrétienne, dans laquelle le loup est considéré au mieux comme un symbole du paganisme, au pire comme un envoyé du diable. Le loup nous fait donc peur presque inconsciemment et il est un des symboles classiques du mal dans les contes qu’on entend depuis tout petit. Par exemple, dans le Petit Chaperon Rouge, la métaphore de la petite fille isolée qui rencontre un grand méchant loup seule au fond des bois est particulièrement explicite.
 Mais lorsqu’on s’intéresse aux faits , les attaques de loups sur l’homme sont plutôt rares. Elles concernent le plus souvent des loups enragés, donc généralement solitaires et pouvant transmettre leur maladie à l’homme. Il arrive aussi qu’un loup acculé se défende mais il cherchera principalement à s’enfuir, pas à tuer. Enfin, lorsque l’environnement naturel des loups est très modifié (proies sauvages absentes et beaucoup de troupeaux domestiques dont les gardiens sont éloignés les uns des autres), ils peuvent attaquer les hommes isolés pour s’en nourrir.
 On est donc bien loin du cas généralement décrits dans les JdR, où une meute affamée s’approche sournoisement d’un groupe d’aventuriers armés jusqu’aux dents. A moins qu’ils ne soient enragés, des loups n’auraient aucune raison d’attaquer dans ces circonstances puisque, comme la plupart des animaux sauvages, un loup chasse pour se nourrir, pas pour le plaisir de fournir de la matière à vos récits le soir au coin du feu. Exit donc le mythe du féroce prédateur !

Quand on voit la tronche des illustrations d’époque de la Bête du Gévaudan, on peut quand même se poser des questions sur le fait qu’il s’agisse bien d’un loup. « La bête du Gévaudan », gravure à l'eau-forte de 1764.

 

Des alternatives crédibles… et bien plus immersives !


« Mais… mais si je ne peux plus opposer mes joueurs à des loups féroces, je fais comment moi ? » Un MJ inquiet.

Les alternatives sont nombreuses et éviter les clichés éculés ne fera que renforcer l’immersion de vos joueurs et l’originalité de l’histoire que vous développez. Si vous cherchez de gros carnivores agressifs pour faire frémir vos joueurs, les ours fonctionneront bien mieux d’un point de vue biologique. Surtout s’il s’agit d’un mâle territorial ou d’une femelle accompagnée de ses petits (qui posera en prime un dilemme moral intéressant à des joueurs pas trop bourrins ou proches de la nature). Largement sous-utilisée, une possibilité intéressante serait d’utiliser des meutes de… chiens sauvages. Sans la peur de l’homme qu’ont les loups, pouvant vivre en bande nombreuses contrairement aux ours, ils feront des opposants redoutables. Et ils ont l’avantage supplémentaire d’être crédibles dans tous les environnements, des plus sauvages aux plus urbanisés. Enfin, le joker TGCM étant toujours possible, n’oubliez-pas qu’il existe dans la plupart des bestiaires des équivalents fantastiques aux animaux sauvages. On peut par exemple citer les Wargs ou les Direwolves, mais il y en a un paquet d’autres. Et ils permettront d’ajouter un élément qui renforcera le sentiment d’immersion dans un univers donné.


Alors, vous êtes convaincus qu’il vaut mieux éviter d’opposer vos joueurs à des meutes de loups ? Dans la seconde partie du Bestiaire des Clichés, j’aborderai le sujet d’un autre hôte fréquent de nos parties, les araignées géantes.


Juliane

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